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Qu'est-ce qu'une tourbière ?
Les tourbières se développent généralement dans les zones fraîches et humides. Elles se caractérisent par l’accumulation progressive d’un dépôt organique qui ne se décompose pas (ou peu) : c'est la tourbe"Du germanique turba « touffe d’herbe », la tourbe (Torf en allemand) est une roche sédimentaire datant de l’époque Quaternaire ou actuelle. Spongieuse et légère (densité < 1), cette roche carbonée (60% de carbone) laisse toujours apparaître des débris végétaux reconnaissables." (du germanique turba « touffe d’herbe »). Les tourbières forment ainsi des écosystèmes"Un écosystème est l'ensemble formé par les facteurs physico-chimiques (abiotiques) et la communauté des espèces (facteurs biotiques) d'une aire donnée." particuliers qui abritent une faune et une flore typiques. Jules César disait qu’elles cachaient aussi des trésors de guerre ! Pour qu’une tourbière apparaisse et se développe, le bilan hydrique, c'est-à-dire la différence entre les apports d’eau (pluies, ruissellements depuis l’amont, sources…) et les pertes (évaporation, ruissellement vers l’aval…), doit être légèrement positif : les apports d’eau doivent être supérieurs aux pertes (4). La tourbière est un milieu évolutif qui voit un lac se transformer progressivement en forêt.
Même si la classification des tourbières n’est pas clairement établie, on peut tout de même les répartir en deux grands groupes : 1) Les tourbières basses des vallées à fond plat, en pays
calcaire"Du latin «calcarius», calcaire, chaux, les calcaires sont des roches sédimentaires, tout comme les grès ou les gypses, facilement solubles dans l'eau, composées majoritairement de carbonate de calcium CaCO3." (Somme, Aisne, Oise, Jura), alimentées par les eaux de surface"Les eaux
de surface regroupent toutes les eaux naturellement ouvertes sur l'atmosphère : les fleuves, les rivières, les lacs, les réservoirs, les ruisseaux, les lacs de barrage, les mers, les estuaires, les sources, les puits et autres collecteurs d'eau..." (ruisseaux, ruisselets, sources…). Ce sont des tourbières soligènes"Du latin solum, « sol » et du grec génos, « engendrer », « qui provient du sol »,
une tourbière soligène est une tourbière alimentée par les eaux superficielles." (du latin
solum, « sol » et du grec génos, « engendrer », « qui provient du sol ». Une tourbière soligène est une tourbière alimentée par les eaux superficielles"Également appelées eaux de surface, les eaux superficielles regroupent toutes les eaux naturellement ouvertes sur l'atmosphère : les fleuves, les rivières, les lacs, les réservoirs, les ruisseaux, les lacs de barrage, les mers, les estuaires, les sources, les puits et autres collecteurs d'eau...".). L’eau y est limpide et généralement alcaline (pH"Le potentiel hydrogène, noté pH, mesure l’activité des protons (H+) et des ions oxoniums (H3O+ et apparentés) en solution, sur une échelle logarithmique allant de 1 à 14. 2) Les tourbières hautes des montagnes, des plateaux granitiques ou siliceux et des régions circumarctiques, alimentées par les eaux météoriques (pluie, neige…). Ce sont des tourbières ombrogènes"Du grec ombros, « eau, orage » et génos, « engendrer », « qui provient de l’eau de pluie »,
une tourbière ombrogène est une tourbière qui doit son origine uniquement aux
précipitations."
(du grec
ombros, « eau, orage » et génos, « engendrer », « qui provient de l’eau de pluie ». Une tourbière ombrogène est une tourbière qui doit son origine uniquement aux précipitations.).
Les Bryophytes du genre Sphagnum (Sphaignes"Du grec sphágnos et du latin sphagnos, « mousse qui s’attache aux branches des arbres », les Sphaignes sont des Bryophytes du genre Sphagnum, apparentées aux Mousses, qui prolifèrent en milieux humides et froids. Les Sphaignes vivantes effectuent la photosynthèse et se développent en surface, au bord des marécages. Les Sphaignes mortes, nommées Hyalocystes, qui absorbent jusqu'à 40 fois leur volume d’eau, s’entremêlent aux Sphaignes vivantes, nommées Chlorocystes. L'ensemble forme une texture caractéristique spongieuse. Les cellules mortes finissent par se déposer sans se décomposer. Ce processus est appelé TOURBIFICATION. Les dépôts de matière organique non-décomposée portent le nom de TOURBE et les milieux humides dans lesquelles les Sphaignes évoluent, celui de TOURBIÈRE. La tourbière est un milieu évolutif qui voit un lac se transformer progressivement en forêt."), apparentées aux Mousses, prolifèrent en milieux humides et froids. Les Sphaignes vivantes, nommées Chlorocystes, effectuent la photosynthèse"La photosynthèse (du grec φῶς phōs « lumière » et σύνθεσις sýnthesis « combinaison »), qui s'effectue chez les Végétaux, les Algues et certaines cellules Procaryotes, est la conversion de l'énergie lumineuse en énergie chimique. Cette dernière est emmagasinée dans des glucides et d'autres molécules organiques, avec accessoirement dégagement de dioxygène." et se développent en surface, au bord des marécages. Elles sont incomestibles : aucun organisme ne s’en nourrit directement (4). Elles absorbent et retiennent l’eau dans de grandes cellules percées de pores. Certaines espèces stockent ainsi une quantité équivalente à 15 à 30 fois leur poids sec. Ainsi un tapis d’une surface de 1 m2 et d’une épaisseur de 20 cm peut retenir jusqu’à 70 kg d’eau (4) ! Pour se procurer les ions nécessaires à leur développement, les Sphaignes possèdent sur la paroi de leurs cellules
un système appelé "échangeurs de cations". Ainsi les acides polyuroniques et les acides phénoliques, qui constituent la matrice cellulosique des parois,
permettent le relargage (la sortie) d'ions hydronium ou proton (H+)
et le captage (l'entrée) d’ions positifs tels que le potassium (K+), le sodium (Na+), le magnésium (Mg2+).
Les cellules gagnent des ions, tandis que le milieu extérieur s’acidifie davantage (la quantité de H+
augmente, le pH diminue). (Fig. 1)
Les Sphaignes mortes, nommées Hyalocystes, qui absorbent jusqu'à 40 fois leur volume en eau (1 volume de Sphaignes mortes absorbe 40 volumes d’eau), s’entremêlent aux Sphaignes vivantes (Chlorocystes). L'ensemble forme une texture spongieuse caractéristique. Les cellules mortes finissent par se déposer sans se décomposer. Ce processus est appelé "tourbification, turbification, turfigenèse ou tourbogenèse" (4). Les dépôts de matière organique non-décomposée portent le nom de "tourbe", qui est une roche carbonée, et les milieux humides dans lesquelles les Sphaignes évoluent, celui de "tourbière".
Une dépression topographique se remplit d’eau : un lac-tourbière"Tourbière ceinturant un petit lac qu’elle finit par recouvrir." se forme
(Fig. 2).
Depuis les berges, certains rhizomes"Du grec rhidzôma, « touffe de racines », un rhizome est une tige souterraine." de plantes pionnières, comme la Potentille des marais ou Comaret (Comarum palustre), le Trèfle d'eau ou Ményanthe Trèfle d'eau (Menyanthes trifoliata) ainsi que le Marisque (Cladium mariscus), forment
des radeaux flottants, aussi appelé tremblants"Zone de pelouse flottante composée de radeaux végétaux flottant à la surface de l'eau, les tremblants se forment en colonisant les étangs ou les mares qu'ils recouvrent parfois intégralement. Cet habitat se caractérise toujours par la nature instable et vacillante du substrat, tremblant sous le pied, d'où son nom. Le tapis flottant est également formé par des entrelacs de rhizomes où croissent Sphaignes et Cypéracées.", de quelques décimètres d’épaisseur en surface du plan d’eau
(Fig. 3) (4).
Puis les Sphaignes"Du grec sphágnos et du latin sphagnos, « mousse qui s’attache aux branches des arbres », les Sphaignes sont des Bryophytes du genre Sphagnum, apparentées aux Mousses, qui prolifèrent en milieux humides et froids. Les Sphaignes vivantes effectuent la photosynthèse et se développent en surface, au bord des marécages. Les Sphaignes mortes, nommées Hyalocystes, qui absorbent jusqu'à 40 fois leur volume d’eau, s’entremêlent aux Sphaignes vivantes, nommées Chlorocystes. L'ensemble forme une texture caractéristique spongieuse. Les cellules mortes finissent par se déposer sans se décomposer. Ce processus est appelé TOURBIFICATION. Les dépôts de matière organique non-décomposée portent le nom de TOURBE et les milieux humides dans lesquelles les Sphaignes évoluent, celui de TOURBIÈRE. La tourbière est un milieu évolutif qui voit un lac se transformer progressivement en forêt."
(voir ici) finissent par coloniser toute la surface du lac ou de l’étang, formant des radeaux mouvants dont l’épaisseur varie de quelques centimètres à plus d’un mètre
(Fig. 4).
Avec le temps, les Sphaignes mortes rebouchent partiellement le plan d'eau et la tourbière s'isole écologiquement du lac originel. Dans ce dernier, l'eau n’est présente que dans la partie centrale. Cette "bulle d’eau" n’alimente pas les Sphaignes qui se développent en surface car celles-ci utilisent l’eau météorique (Fig. 5). En revanche, grâce à leur pouvoir absorbant, les Sphaignes mortes se gorgent de cette "bulle d’eau", qui finit par disparaître (Fig. 6).
C’est ainsi l’eau météorique, plutôt acide et pauvre en minéraux, qui conditionne la végétation en surface et la production de tourbe en profondeur : on parle d’alimentation ombrotrophe"Du grec ombros, « eau, orage » et trophê,
« nourriture, croissance », « qui est nourrit par l’eau de pluie », ombrotrophe caractérise un écosystème, comme une tourbière, alimenté en eau et en sels minéraux uniquement par les précipitations atmosphériques et les vents.". Les Sphaignes, à croissance continue vers le haut, produisent de la tourbe par leurs parties mortes (vers
le bas), ce qui fait remonter la surface de la tourbière et produit le bombement caractéristique. Ce phénomène s’étale sur plusieurs millénaires et le bombement peut atteindre plusieurs mètres de hauteur. C'est pourquoi les bords de la tourbière, plus ou moins pentus, sont parfois appelés "coteaux"
(Fig. 7).
Outre l'enlisement, passer au travers du radeau flottant constitue un risque bien réel pour le promeneur qui s'aventure sur une tourbière (Fig. 8).
Les lacs-tourbières de France se trouvent essentiellement en moyenne montagne, où les tourbières soumises à des conditions climatiques plus rudes qu’en plaine, évoluent beaucoup plus lentement.
En haute montagne, les lacs-tourbières sont généralement situés entre 1 500 et 2 300 m d’altitude, sur un substrat siliceux imperméable, modelé par les glaciers, ou recouvert de moraines. L’aspect extrêmement morcelé de ces lacs, le climat froid et le long enneigement limitent la composition floristique ainsi que le bombement de ces tourbières par rapport à leurs homologues de moyenne montagne et de plaine.
1) Parce que la paroi cellulaire des Sphaignes contient des composés phénoliques non-biodégradables, résistant au froid et au rayonnement ultraviolet. 2) Parce que des composés acides et phénoliques contenus dans les Sphaignes inhibent l’activité bactérienne. (Relargage d'ions H+ dans le milieu extérieur qui s'acidifie davantage [voir ici]). 3) Parce que le froid et surtout la très faible teneur en nutriments des tourbières ralentissent considérablement la dégradation par les micro-organismes.
1) Il n’y a pas de formation de dioxyde de carbone (CO2). Les tourbières forment ainsi des réservoirs de carbone qui concourent ainsi à stabiliser la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. 2) Bien que l’atmosphère de la Terre soit composé de 78 % d'azote, les Végétaux ne peuvent pas utiliser le diazote gazeux libre parce que cette molécule est chimiquement très stable en raison de la liaison triple qui unit deux atomes d’azote. Ainsi, pour être assimilable par les Végétaux, le N2 atmosphérique doit être réduit en ammoniac (NH3) par des bactéries. Ce procédé est appelé "fixation de l’azote".
Bien que les Bactéries ammonifiantes soient communes dans les tourbières ombrotrophes (5), la nitrification ne peut pas y être menée à son terme car les Bactéries nitrifiantes sont rares (6). Or c’est principalement sous la forme d’ion nitrate, et dans une moindre mesure d’ion ammonium, que l’azote est assimilé par les plantes.
Les plantes qui poussent dans les tourbières n’ont aucun mal à fabriquer des glucides grâce à la photosynthèse, mais sont très limitées pour combler leurs besoins en azote qu’elles ne peuvent prendre ni dans l’air (diazote gazeux non assimilable), ni dans le sol (très peu d’ions ammonium et d’ions nitrate). Voilà pourquoi, dans les tourbières, les plantes carnivores prolifèrent. En effet, ces végétaux obtiennent une partie de leur apport en azote en digérant des insectes ainsi que d’autres petits animaux.
Trois genres de plantes insectivores se trouvent dans les tourbières de nos contrées : (4)
On appelle « horizon pédologique », ou « horizon d'un sol », la couche de sol homogène et sensiblement parallèle à la surface, constituée de plusieurs strates (ou couches) de natures et épaisseurs différentes. Dans les tourbières, les horizons se composent essentiellement de matière organique gorgée en eau. On parle alors d'histosol"Du grec histós « trame, tissu » et du latin solum « fondement, base », l’histosol est un sol composé essentiellement de matière organique gorgée en eau : c’est typiquement le sol des tourbières.", du grec histós « trame, tissu » et du latin solum « fondement, base ». On distingue 2 niveaux hydrologiques dans l’histosol"Du grec histós « trame, tissu » et du latin solum « fondement, base », l’histosol est un sol composé essentiellement de matière organique
gorgée en eau : c’est typiquement le sol des tourbières." d’une tourbière ombrogène"Du grec ombros, « eau, orage » et génos, « engendrer », « qui provient de l’eau de pluie »,
une tourbière ombrogène est une tourbière qui doit son origine uniquement aux
précipitations." :
Les lacs qui ont évolué en tourbières sont des sites précieux pour étudier la paléoclimatologie grâce aux pollens conservés dans la tourbe. Ils permettent de connaître les climats qui se sont succédé pendant les derniers millénaires. (7) La tourbe est une roche carbonée qui a largement été utilisée comme combustible de chauffage. En effet, même si son pouvoir calorique est faible par rapport à celui du charbon (deux tiers environ) et également du bois, sa combustion lente fournit une chaleur continue, un peu à la façon de la braise. Jusqu’à la fin des années 1940, la tourbe servait encore de combustible pour le chauffage. Depuis les années 1950, son utilisation s’est davantage orientée vers l’horticulture.
Les tourbières sont des écosystèmes"Un écosystème est l'ensemble formé par les facteurs physico-chimiques (abiotiques) et la communauté des espèces (facteurs biotiques) d'une aire donnée."
récents (quelques milliers d’années tout au plus) où les réseaux trophiques"La chaine alimentaire,
c'est-à-dire la circulation de l’énergie des nutriments depuis leur source dans
les organismes photosynthétiques (producteurs) jusqu’aux différents types de
consommateurs, comprend plusieurs chaînons ou niveaux nommés « niveaux
trophiques » (grec « trophê », nourriture).
N°1
URRY Lisa, CAIN Michael, MINORSKY Peter, WASSERMAN Steven, REECE Jane
(2020)
N°2 FISCHESSER Bernard (2018)
N°3
GAUTHIER Robert (2001) N°4
MANNEVILLE Olivier et coll
(2006)
N°5
DICKINSON C. H. (1983)
N°6
COLLINS V.G., D'SYLVA B.T., LATTER P.M. (1978)
N°7 Jacques DEBELMAS,
Arnaud PÊCHER et Jean-Claude BARFÉTY (2002)
N°1' Eric DRONNET, Belles Fleurs de France http://erick.dronnet.free.fr/belles_fleurs_de_france N°2' Franck LE DRIANT, FLOREALPES, https://www.florealpes.com |
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